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10 mars 2017 5 10 /03 /mars /2017 13:29

                                   Mon village n’est plus

Mon beau village est mort

Tué par la ville et l’évolution

Tué par l’émancipation et la civilisation

 

Mon grand-père n’est plus

Mon bon grand-père est mort

Tué par la vieillesse

La maladie et l’usure

 

Ma grand-mère n’est plus

Ma gentille grand-mère est morte

Tuée par les durs travaux des champs

La marche en forêt et le paysannat

 

Mon père n’est plus

Mon fameux père est mort

Tué par les durs travaux des champs

La misère et l’abandon

 

Ma mère n’est plus

Ma tendre mère est morte

Tuée par les soucis des enfants

La misère et l’abandon

 

Moi la progéniture je ne suis plus

Moi-même le rejeton je suis mort

Tué par l’orgueil et la vanité

Tué par la gourmandise et la luxure

Tué par la paresse

La corruption et l’opprobre.

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9 mars 2017 4 09 /03 /mars /2017 15:33

Les boeufs pleurent bien, ces longs beuglements étaient bien des plaintes, des cris désespérés. Cela, Yoro, l’homme des bœufs, le savait depuis son enfance, mais c’était la première fois qu’il les percevait ainsi, ces pleurs, si forts et si déchirants.
Et il ne pouvait rien faire pour ses bêtes, rien que les suivre dans leur trouble errance.

Ce pays était devenu sec, sec ; incroyablement desséché et abandonné.
Depuis deux jours ils n’avaient rencontré que des villages désertés, aux puits morts, comme sucés par la soif des hommes, jusqu’à la toute dernière goutte d’eau. Jadis, dans les récits des veillées, Yoro avait entendu les anciens parler de terribles sécheresses ; mais avait toujours perçu cela comme les autres terribles choses de la mythologie ; terribles mais lointaines.
Et pourtant ce qu’il vivait depuis deux mois n’avait rien des contes et des récits ; il vivait une bien plus terrible réalité.

Il avait vu la soif et la faim des hommes ; des hommes devenant, s’enfuyant devant eux, en hordes perdues, sans but défini, comme vers la mort.

Il avait vu des bergers affolés vendre leurs troupeaux, pour une bouchée de pain, à des spectateurs venus de la ville, avec des gros camions, tout rafler après de cyniques marchandages.

Aux yeux du berger, les choses semblaient encore plus horribles pour les animaux : partout des bœufs, des moutons, des chèvres maigrissant, fondant littéralement avant de s’écrouler pour ne plus se relever.

Partout des troupeaux décimés, des dépouilles de bêtes que l’on ne dissimulait pas rapidement comme celles des hommes, et qui pourrissaient au soleil, chargeant l’air déjà suffocant d’une fétide odeur de mort.
Et il avait même vu des bœufs se tuer, oui, en se jetant au fond des puits secs, préférant, eux que l’ont dit bêtes, la mort à la désespérante vie sans eau.

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9 mars 2017 4 09 /03 /mars /2017 14:19

A l’ombre de l’Afrique

l’on conduit des autos de luxe

l’on fume du tabac de Havane

quoique l’on n’ait pas de gîte

digne de ce nom

L’argent et son existence

exaltent la pensée

incitent à choisir le coup d’état

comme unité de lieu d’une méditation

 

A l’ombre de l’Afrique

l’on passe sa vie entière

à offrir son petit sou

aux griots de la cour

chantant sa gloire

Cherchant à établir les conditions

d’une riche vie

l’on explore les étapes essentielles

qui lient l’individu à Lucifer.

 

A l’ombre de l’Afrique

l’on se dispute le privilège

de gober les provisions

appartenant à la nation.

Et l’on se montre l’un à l’autre

les miettes du pillage avec orgueil

tirant vanité de la resquille commise. 

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9 mars 2017 4 09 /03 /mars /2017 13:38

J’ai marché mille ans ! Dans ce pays d’exil

Qui gémit et mûrit sous le poids des démons

J’ai pincé la Cora dans la légende des temps,

Pour retrouver les Voix sous l’amas des années,

Les revoir, les sentir, les entendre comme jadis

Dans les contes, les récits, les propos de nos mères.

On ne voit que la Nuit, les démons à nos trousses ;

On ne sent que le temps, les deuils, les sanglots

D’un pays qui gémit au printemps de la vie !
 

Où sont-ils donc allés, les héros indomptables,

Qui bravaient la tourmente, arrachaient à l’angoisse,

Ranimaient la confiance et menaient aux combats ?

Sous le poids des démons, des laquais, des complices,

Pour revivre les Voix, leurs plaintes, leur révolte,

Mépriser la mort, marcher aux combats, arracher la victoire,

Mille ans ! Nous cherchons le rayon pour tracer le sillon !

Ranime le feu ma sœur ;

La nuit venue est noire ;

Il faut marcher sans bruit.

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9 mars 2017 4 09 /03 /mars /2017 13:07

Petit-Paris a pleuré

                       En cette nuit moirée

                            Martelée par les cris stridents

                                                   D’hommes et de femmes abasourdis.

                                                   Les oreilles de Zoa ont vibré ;

                                                  Dans une fortification en contrebas,

                                                 Des enfants lapés par les lames de feu,

                                           Se consument au fond d’un puits de flammes,

                                                 Abîme brûlant, rougeâtre et jaunâtre,

                                         Prisonniers d’une forteresse d’acier incandescente.

                                               Par instinct de survie, au sein de leur âtre

                                           Des bambins candides, de chair et d’os meurtris

                                                 Communiant dans leur passion, tentent

                                                            De conjurer le sort.

Fondant, calcinés, agglutinés

Autour de l’aîné, ils cherchent un port.

Les cinq petits êtres, la combustion

Aidant, se muent en lave de plomb

Suintante, bientôt séchée et moulue.

Pendant cette nuit lugubre

                         Petit-Paris a pleuré

                     Les yeux de Zoa ont vu :

         Hommes et femmes jusqu’au sang, émus

                Bras ballants, impuissants,

            Assister à ce spectacle révoltant.

             Des pompiers arrivés bien trop tard

- Manque de carburant ? Peur des farceurs ? -

Ayant pour équipement sinistre et meurtrier

Un matériel de fer et d’acier, puis

Trois petits cercueils noirs

Défoncent, arrachent, scient

Portes et fenêtres pour extirper

De cette fournaise l’amas de corps

Calcinés, carbonisés, lacérés de

ASAFA, ABOU, MOUSSA

DADA et AICHA !!! (…)

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6 février 2017 1 06 /02 /février /2017 13:24

On vient de marier le dernier.
Tous nos enfants sont désormais heureux sans nous.
Ce soir il me vient une idée :
Si l'on pensait un peu à nous,
Un peu à nous.

On s'est toujours beaucoup aimés,
Mais sans un jour pour vraiment s'occuper de nous,
Alors il me vient une idée :
Si l'on partait comme deux vieux fous,
Comme deux vieux fous.

On habiterait à l'hôtel.
On prendrait le café au lit.
On choisirait un p'tit hôtel
Dans un joli coin du midi.
Ce soir il me vient des idées,
Ce soir il me vient des idées.

On a toujours bien travaillé.
On a souvent eu peur de n'pas y arriver.
Maintenant qu'on est tous les deux,
Si l'on pensait à être heureux,
A être heureux.

Tu m'as donné de beaux enfants.
Tu as le droit de te reposer maintenant,
Alors il me vient une idée :
Comm'eux j'aimerais voyager,
Hmmm Voyager.

Mais on irait beaucoup moins loin :
On n'partirait que quelques jours
Et si tu me tiens bien la main,
Je te reparlerai d'amour.
Ce soir il me vient des idées,
Ce soir il me vient des idées.

Nous revivrons nos jours heureux
Et jusqu'au bout moi je ne verrai plus que toi.
Le temps qui nous a rendus vieux
N'a pas changé mon cœur pour ça,
Mon cœur pour ça.

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6 février 2017 1 06 /02 /février /2017 13:14

            Mon enfant, ma sœur,

             Songe à la douceur

    D'aller là-bas vivre ensemble !

             Aimer à loisir,

             Aimer et mourir

    Au pays qui te ressemble !

             Les soleils mouillés

             De ces ciels brouillés

    Pour mon esprit ont les charmes

             Si mystérieux

             De tes traîtres yeux,

    Brillant à travers leurs larmes.

 

 

         Là, tout n'est qu'ordre et beauté,

                Luxe, calme et volupté.

 

 

             Des meubles luisants,

             Polis par les ans,

      Décoreraient notre chambre;

             Les plus rares fleurs

             Mêlant leurs odeurs

      Aux vagues senteurs de l'ambre,

             Les riches plafonds,

             Les miroirs profonds,

         La splendeur orientale,

             Tout y parlerait

             A l'âme en secret

         Sa douce langue natale.

 

 

      Là, tout n'est qu'ordre et beauté,

         Luxe, calme et volupté.

 

 

             Vois sur ces canaux

             Dormir ces vaisseaux

       Dont l'humeur est vagabonde ;

             C'est pour assouvir

             Ton moindre désir

        Qu'ils viennent du bout du monde.

             - Les soleils couchants

             Revêtent les champs,

        Les canaux, la ville entière,

             D'hyacinthe et d'or ;

             Le monde s'endort

        Dans une chaude lumière.

 

 

     Là, tout n'est qu'ordre et beauté,

           Luxe, calme et volupté.

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6 février 2017 1 06 /02 /février /2017 13:12

Je fête l'essentiel je fête ta présence
Rien n'est passé la vie a des feuilles nouvelles
Les plus jeunes ruisseaux sortent dans l'herbe fraîche

 

Et comme nous aimons la chaleur il fait chaud

Les couleurs brûlent les fruits abusent du soleil
Puis l’automne courtise ardemment l’hiver vierge

 

L’homme ne mûrit pas il vieillit ses enfants

Ont le temps de vieillir avant qu’il ne soit mort
Et les enfants de ses enfants il les fait rire

 

Toi première et dernière tu n’as pas vieilli

Et pour illuminer mon amour et ma vie
Tu conserves ton cœur de belle femme nue.

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6 février 2017 1 06 /02 /février /2017 13:06

1. Où vont tous ces enfants dont pas un seul ne rit ?

2. Ces doux êtres pensifs, que la fièvre maigrit ?

3. Ces filles de huit ans qu'on voit cheminer seules ?

4. Ils s'en vont travailler quinze heures sous des meules ;

5. Ils vont, de l'aube au soir, faire éternellement

6. Dans la même prison le même mouvement.

7. Accroupis sous les dents d'une machine sombre,

8. Monstre hideux qui mâche on ne sait quoi dans l'ombre,

9. Innocents dans un bagne, anges dans un enfer,

10. Ils travaillent. Tout est d'airain, tout est de fer.

11. Jamais on ne s'arrête et jamais on ne joue.

12. Aussi quelle pâleur! la cendre est sur leur joue.

13. Il fait à peine jour, ils sont déjà bien las

14. Ils ne comprennent rien à leur destin, hélas !

15. Ils semblent dire à Dieu : "Petits comme nous sommes,

16. Notre père, voyez ce que nous font les hommes !"

17. O servitude infâme imposée à l'enfant !

18. Rachitisme! travail dont le souffle étouffant

19. Défait ce qu'a fait Dieu ; qui tue, oeuvre insensée,

20. La beauté sur les fronts, dans les coeurs la pensée,

21. Et qui ferait - c'est là son fruit le plus crétin !-

22. D'Apollon un bossu, de Voltaire un crétin !

23. Travail mauvais qui prend l'âge tendre en sa serre,

24. Qui produit la richesse en créant la misère,

25. Qui se sert d'un enfant ainsi que d'un outil !

26. Progrès dont on demande : Où va-t-il ? que veut-il ?

27. Qui brise la jeunesse en fleur ! qui donne, en somme,

28. Une âme à la machine et la retire à l'homme !

29. Que ce travail, haï des mères, soit maudit !

30. Maudit comme le vice où l'on s'abâtardit,

31. Maudit comme l'opprobre et comme le blasphème !

32. Ô Dieu ! qu'il soit maudit au nom du travail même,

33. Au nom du vrai travail, sain, fécond, généreux,

34. Qui fait le peuple libre et qui rend l'homme heureux !

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6 février 2017 1 06 /02 /février /2017 13:01

C'est un trou de verdure où chante une rivière,
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.

Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.

Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme:
Nature, berce-le chaudement : il a froid.

Les parfums ne font pas frissonner sa narine;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.

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