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24 octobre 2019 4 24 /10 /octobre /2019 13:20

Étés réverbérés par le gravier jaune et chaud, étés traversant le jonc tressé de mes grands chapeaux, étés presque sans nuits... Car j'aimais tant l'aube, déjà, que ma mère me l'accordait en récompense: J'obtenais qu'elle m'éveillât à trois heures et demie, et je m'en allais, un panier vide à chaque bras, vers des terres maraîchères qui se réfugiaient dans le pli étroit de la rivière, vers les fraises, les cassis et les groseilles barbues.

 A trois heures et demie, tout dormait dans un bleu originel, humide et confus, et quand je descendais le chemin de sable, le brouillard retenu par mon poids baignait d'abord mes jambes, puis mon petit torse bien fait, atteignait mes lèvres, mes oreilles et mes narines plus sensibles que tout le reste de mon corps… J'allais seule, ce pays mal pensant était sans dangers. C'est sur ce chemin, c'est à cette heure que je prenais conscience de mon prix, d'un état de grâce indicible et de ma connivence avec le premier souffle accouru, le premier oiseau, le soleil encore ovale, déformé par son éclosion…

 Ma mère me laissait partir, après m'avoir nommée " Beauté, Joyau-tout-en-or "; elle regardait courir et décroître - sur la pente son œuvre - " chef-d’œuvre ", disait-elle. J'étais peut-être jolie ; ma mère et mes portraits de ce temps-là ne sont pas toujours d'accord... Je l'étais à cause de mon âge et du lever du jour, à cause des yeux bleus assombris par la verdure, des cheveux blonds qui ne seraient lissés qu'à mon retour, et de ma supériorité d'enfant éveillée sur les autres enfants endormis.

 Je revenais à la cloche de la première messe. Mais pas avant d'avoir mangé mon saoul, pas avant d'avoir dans les bois, décrit un grand circuit de chien qui chasse seul, et goûté l'eau de deux sources perdues, que je révérais L'une se haussait hors de la terre par une convulsion cristalline, une sorte de sanglot, et traçait elle-même son lit sableux. Elle se décourageait aussitôt née et replongeait sous la terre. L'autre source, presque invisible,, froissait l'herbe comme un serpent, s'étalait secrète .au centre d'un pré où des narcisses, fleuris en rende, attestaient seuls sa présence. La première avait goût de feuille de chêne, la seconde de fer et de tige de jacinthe... Rien qu'à parler d'elles je souhaite que leur saveur m'emplisse la bouche au moment de tout finir, et que j'emporte, avec moi, cette gorgée imaginaire...

 

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5 avril 2019 5 05 /04 /avril /2019 13:34

Chant du coupeur d’okoumés (chant pour guitare), poème de Pierre  Edgar Moudjegou Mangangue,
chanté par Pierre Claver Akendengue

 

Ma hache défie le bois

Ma hache mord le bois

Ma hache déteste le bois

Je connais ma hache

 

Quand elle rit quand elle pleure

Quand elle se fâche

Ma hache mord le bois

Le soleil mord mon corps

Ma hache mord le bois

Et moi je déteste les…

 

La journée est longue

Mais moi je ris

La journée est pénible

Mais moi je chante

La fin du mois est stérile

Mais moi je ris

La fin du mois est stérile

Mais moi je bosse

Mes poches sont vides

Je chante

Mes journées sont rudes

Je chante

Mes doigts sont en sang

Je bosse

Je n’ai pas de repos

Je n’ai pas de sommeil

Mes nuits de cauchemars

Les pleurs des enfants qui ont faim et qui veulent chaque jour

Un peu plus

De bon matin, je cherche ma hache

Je connais ma hache

Ma hache défie le bois

Ma hache mord le bois

Ma hache déteste le bois

Et moi je déteste les…

 

Le soleil mord mon corps

Je chante

Les mouches tsé tsé sucent mon sang

Je chante

Les moustiques boivent mon sang

Je chante

Pourtant je déteste ces bestioles comme je déteste les…

Ma hache en sueur

Ma hache en larmes

Ma hache en deuil

Les piqures des bestioles

Les cris de la faim

Les nuits de cauchemar

Je connais ma hache

Ma hache défie le bois

Ma hache mord le bois

Ma hache déteste le bois

Et moi je déteste les…

 

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5 avril 2019 5 05 /04 /avril /2019 13:26

Considérable (chanson gabonaise),
Pierre Claver Akendengue

 

Petit par les centimètres, grand par les sentiments, il s’appelait Powè.

Il aimait chanter : « ah, que le monde est méchant, mais que Dieu est grand ! »

Mais chaque fois qu’il chantait, il tombait des gouttes d’eau.

Les hommes en ont eu marre, l’ont chassé du village.

Powè s’en est allé, le cœur gros loin de son pays

Considérable

 

Il prit congé de la chouette qui s’arracha les cheveux de douleur

S’embarqua dans son bateau mû par un moteur en bois du pays

Il croisa les hommes-léopards qui se nourrissent de sang,

Se curent les dents assis sur des bancs de sable en bois

Pendant que les femmes chassent hippopotames et crocodiles dans le pays

Considérable

 

Et pour la première fois, il arriva dans la ville du pays

C’était un jour de marché, il vit beaucoup de gens marcher

Et marchander : « cadeau y en a, cadeau y en a, y a bon »

Et chacun de remplir son panier

D’un peu de pollution, d’un petit peu d’indigestion, d’un peu d’aliénation et taxation du pays

Considérable

 

Sur ce sonna l’Angelus en même temps que le canon, un vieux canon

Tous les enfants du pays comme un seul se mirent au pas en plein marché

« Toute religion sert une politique », ces quelques mots à peine lancés

Powè fut emmené à plat ventre, sur le dos

Par les mercenaires du pays qui l’enfermèrent au cachot

Considérable, considérable

 

Et derrière les barreaux,

Powè se mit à chanter et il tomba beaucoup d’eau

Craignant une inondation, le geôlier supplia Powè de passer la frontière.

Et de frontière en frontière, Powè remarqua qu’à chacune de nos frontières arbitraires

Une armée de mercenaires s’entraine en chuchotant le nom de sa prochaine victime,

Quelqu’un que nous savons épris de paix et de liberté

La liberté

 

 Un pays ami-ami remarqua que Powè avait de bons réflexes

L’engagea comme tirailleur, mais dès lors que l’on tire par réflexe

Il tombe toujours quelque chose

Parfois des gouttes d’eau, parfois un peu de sang

Un jour ce furent des gouttes d’eau, mais les 200 d’innocents…

Considérable

 

Grand par les sentiments, lassé de tirer ailleurs, le tirailleur

Powè pensa que la situation nécessitait qu’il revint tirer chez nous

« vivre sans vivre la libération de mon pays, ce n’est pas digne de moi »

Mais ces quelques mots à peine pensés, Powè sera pendu.

 

Tout le peuple s’assemble place de l’Indépendance autour de la potence

Powè chanta à pleine voix : « VIVRE SANS VIVRE LA LIBERTE DANS NOTRE PAYS CE N’EST PAS DIGNE D’UN PEUPLE CONSIDERABLE COMME NOUS »

Sur ce, la pluie redoubla de violence

Et dans la confusion qui suivit

On ne revit pas Powè

On ne revit pas Powè

 

Mais depuis ce jour-là un petit oiseau gris chante : « Powè, Powè »

Et il tombe de l’eau. Alors chacun se souvient :

« VIVRE SANS VIVRE LA LIBERTE DANS SON PAYS CE N’EST PAS DIGNE D’UN PEUPLE CONSIDERABLE».

Mais tout peuple est considérable

Considérable.

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29 mars 2019 5 29 /03 /mars /2019 16:38
https://www.youtube.com/watch?v=iUtfM28jafo

Mon pays

S’attarde vers la mer

Puis soudain voyage

A travers soleil et pluie

 

Mon pays

Accroche ses forêts

Tel un radeau de feuilles mortes le long du fleuve

Est bien étrange la lente marche des mortels

A l’est de l’immortalité

 

Dans mon pays

Il y a bien des rêves qui pagaient

Tant de pagayeurs qui n’arriveront jamais

Mon pays

Avale à fortes doses

De ce vin en poudre dont raffolent nos dame-jeanne

Mon pays a planté dans ses fortins

Quelques canons qui serviraient de téléphones

Que sont étranges tant de signes avant-coureurs

Des folies et des drames à venir

Car mon pays, c’est comme un regard qui espère

Ou redoute quelque chose qui doit venir

 

Mais dans la nuit,

un grand éclat de rire

C’est mon pays qui rit

Ou qui pleure comme on rit

C’est mon pays qui pleure sa liberté en riant

Comme font les tambours et en battant des mains

 

Accourent alors les étrangers

Ceux qui chantent en silence

Soupirent en silence

S’étonnent en silence

Car dans mon pays

Le rire des pauvres gens

C’est étrange pour les riches

Qui ont perdu

Leur pays

Ton pays

Mon pays

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16 décembre 2018 7 16 /12 /décembre /2018 12:57

Considérant que la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde,
Considérant que la méconnaissance et le mépris des droits de l'homme ont conduit à des actes de barbarie qui révoltent la conscience de l'humanité et que l'avènement d'un monde où les êtres humains seront libres de parler et de croire, libérés de la terreur et de la misère, a été proclamé comme la plus haute aspiration de l'homme,
Considérant qu'il est essentiel que les droits de l'homme soient protégés par un régime de droit pour que l'homme ne soit pas contraint, en suprême recours, à la révolte contre la tyrannie et l'oppression,
Considérant qu'il est essentiel d'encourager le développement de relations amicales entre nations,
Considérant que dans la Charte les peuples des Nations Unies ont proclamé à nouveau leur foi dans les droits fondamentaux de l'homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine, dans l'égalité des droits des hommes et des femmes, et qu'ils se sont déclarés résolus à favoriser le progrès social et à instaurer de meilleures conditions de vie dans une liberté plus grande, Considérant que les Etats Membres se sont engagés à assurer, en coopération avec l'Organisation des Nations Unies, le respect universel et effectif des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
Considérant qu'une conception commune de ces droits et libertés est de la plus haute importance pour remplir pleinement cet engagement,
L'Assemblée générale Proclame la présente Déclaration universelle des droits de l'homme comme l'idéal commun à atteindre par tous les peuples et toutes les nations afin que tous les individus et tous les organes de la société, ayant cette Déclaration constamment à l'esprit, s'efforcent, par l'enseignement et l'éducation, de développer le respect de ces droits et libertés et d'en assurer, par des mesures progressives d'ordre national et international, la reconnaissance et l'application universelles et effectives, tant parmi les populations des Etats Membres eux-mêmes que parmi celles des territoires placés sous leur juridiction.

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16 mars 2018 5 16 /03 /mars /2018 14:31

Redjo : on se retrouve.

Samaras : babouches africaines.

(Être) serré : ê tre dans le besoin (sur le plan financier),dans l’embarras.

Sauvetteur : vendeur à la sauvette.

(Un) show : spectacle de réjouissances ici.

Sucrerie : boisson sucrée non alcoolisée, gazeuse ou non.

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14 mars 2018 3 14 /03 /mars /2018 11:38

Parents : ici, compagnons d’infortune, dans le jargon estudiantin.

Paris-go : personne ayant déjà été à Paris.

Paroles à l’eau d’abeille : sucrées comme le miel, flatteries.

Pia : argent.

Plats « only for dog » : nom générique désignant toute nourriture pour chien.

Pointer : se rendre régulièrement chez une fille pour lui faire la cour.

Probatoire : examen en fin de classe de première, conditionnant l’entrée en terminale ou bac probatoire.

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8 mars 2018 4 08 /03 /mars /2018 12:17
Haut-d’en-haut : nantis, riches, au sommet de la pyramide
sociale, hauts fonctionnaires.
 
Individu : injure grave signifiant « imbécile », « sauvage ».
 
Jo : équivalent de « mon cher », « mon pote », « man »,
« mec »,mani.
 
Kimé ou quimé : lieu de restauration populaire où règne
l’anonymat. De l’expression : « Qui me connaît ? ».
 
Kita : pagne d’apparat de fabrication traditionnelle.
 
Lampe-tempête : lampe à pétrole munie d’un piston et
d’un manchon.
 
Libérien : compagnon d’infortune. Remplace Cambodgien…
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7 mars 2018 3 07 /03 /mars /2018 18:56
Garbadrome : lieu où les hommes vendent du garba (attiéké grossier fait par des hommes).
 
Gbaka : véhicule de transport en commun, minibus de 15 places (panier, en dioula).
 
Go : jeune fille. Copine, petite amie.
 
Gréver : faire grève.
 
Grioticien : spécialiste de la griotique, forme de théâtre africain moderne.
Dérivés : griodrame, griotacles, grioternisme, grioture.
 
(Une) grosse : grande bouteille de bière.
 
Grotto : riche fonctionnaire qui entretient une ou plusieurs relations extraconjugales.
 
Guédé gba : gros beignet de farine.
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7 mars 2018 3 07 /03 /mars /2018 14:16

Garbadrome : lieu où les hommes vendent du garba (attiéké grossier fait par des hommes).

Gbaka : véhicule de transport en commun, minibus de 15 places (panier, en dioula).
 
Go : jeune fille. Copine, petite amie.
 
Gréver : faire grève.
 
Grioticien : spécialiste de la griotique, forme de théâtre africain moderne.
Dérivés : griodrame, griotacles, 
grioternisme, grioture.
 
(Une) grosse : grande bouteille de bière.
 
Grotto : riche fonctionnaire qui entretient une ou plusieurs relations extraconjugales.
 
Guédé gba : gros beignet de farine.
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